Le dépôt d’une soumission par une entreprise peut-il engendrer une responsabilité personnelleLes principes juridiques liés au processus d’appel d’offres sont généralement bien connus des entrepreneurs. L’obligation de la conformité de l’offre aux documents d’appel d’offres, le principe de l’irrégularité mineure et l’égalité de traitement entre les soumissionnaires sont tous des principes sur lesquels les tribunaux ont basé un grand nombre de décisions.
Départager les soumissionnaires s’avère normalement aisé pour le donneur d’ouvrage lorsque les seules considérations sont la conformité de la soumission et le prix. Ainsi, sauf exercice d’une clause de réserve discrétionnaire[1], le contrat sera octroyé à la plus basse soumission conforme.
Toutefois, les donneurs d’ouvrage ont de plus en plus recours à des grilles de pointage qualitatif dans le cadre du processus décisionnel d’octroi d’un contrat. La logistique prévoit alors que :
1. la conformité des soumissions est examinée, les soumissions non conformes étant rejetées à cette étape;
2. les soumissions jugées conformes se voient attribuer un pointage en fonction d’une grille d’évaluation. Les critères d’évaluation varient, mais notons les éléments suivants : l’expérience du soumissionnaire concernant des projets similaires, l’expérience des chargés de projet, la qualité du projet proposé (design-built) et la gestion interne de la qualité;
3. les soumissions obtenant la note de passage passent à l’étape de la comparaison du prix. À cette étape, la soumission ayant le prix le plus bas l’emporte (sauf exercice d’une clause de réserve).
Le soumissionnaire a donc un intérêt manifeste à ce que son entreprise paraisse sous son meilleur jour. La tentation de bonifier son expérience, ses connaissances ou ses qualifications est donc grande. Mais où se situe la limite ? Quand franchit-on la frontière de l’embellissement de bonne foi et traverse-t-on dans la mauvaise foi, la tromperie ? Et quelles sont les conséquences ?
Récemment la Cour d’Appel du Québec a statué que le processus d’appel d’offres comprenant une étude qualitative ne pouvait fonctionner efficacement que si on peut entièrement se fier aux déclarations des soumissionnaires[2].
La franchise et la vérité devant primer dans le contenu de la soumission, la conduite du soumissionnaire sera évaluée par les tribunaux en fonction de la réponse à la question suivante :
– le soumissionnaire était-il de bonne foi lorsqu’il a rédigé la soumission ?
Dans la négative, le soumissionnaire et les personnes ayant participé à la rédaction de la soumission se rendront personnellement responsables des dommages causés au donneur d’ouvrage et aux autres soumissionnaires.
[1] À titre d’exemple : Le donneur d’ouvrage ne s’engage pas à retenir la plus basse soumission conforme ou aucune des soumissions déposées.
[2] Immobilière (L’), société d’évaluation conseil inc. c. Évaluations BTF inc., 2009 QCCA 1844
À lire, prochain Partenaires:
Qu’est-ce que le patrimoine familial ?
Par: Jean-Luc Pétrin
Pensée de la semaine:
Un esprit qui, jour après jour, relève les bons défis et choisit les bonnes batailles reste serein et grandit sainement. [Daniel Desbiens]
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Les principes juridiques liés au processus d’appel d’offres sont généralement bien connus des entrepreneurs. L’obligation de la conformité de l’offre aux documents d’appel d’offres, le principe de l’irrégularité mineure et l’égalité de traitement entre les soumissionnaires sont tous des principes sur lesquels les tribunaux ont basé un grand nombre de décisions.
Départager les soumissionnaires s’avère normalement aisé pour le donneur d’ouvrage lorsque les seules considérations sont la conformité de la soumission et le prix. Ainsi, sauf exercice d’une clause de réserve discrétionnaire[1], le contrat sera octroyé à la plus basse soumission conforme.
Toutefois, les donneurs d’ouvrage ont de plus en plus recours à des grilles de pointage qualitatif dans le cadre du processus décisionnel d’octroi d’un contrat. La logistique prévoit alors que :
1. la conformité des soumissions est examinée, les soumissions non conformes étant rejetées à cette étape;
2. les soumissions jugées conformes se voient attribuer un pointage en fonction d’une grille d’évaluation. Les critères d’évaluation varient, mais notons les éléments suivants : l’expérience du soumissionnaire concernant des projets similaires, l’expérience des chargés de projet, la qualité du projet proposé (design-built) et la gestion interne de la qualité;
3. les soumissions obtenant la note de passage passent à l’étape de la comparaison du prix. À cette étape, la soumission ayant le prix le plus bas l’emporte (sauf exercice d’une clause de réserve).
Le soumissionnaire a donc un intérêt manifeste à ce que son entreprise paraisse sous son meilleur jour. La tentation de bonifier son expérience, ses connaissances ou ses qualifications est donc grande. Mais où se situe la limite ? Quand franchit-on la frontière de l’embellissement de bonne foi et traverse-t-on dans la mauvaise foi, la tromperie ? Et quelles sont les conséquences ?
Récemment la Cour d’Appel du Québec a statué que le processus d’appel d’offres comprenant une étude qualitative ne pouvait fonctionner efficacement que si on peut entièrement se fier aux déclarations des soumissionnaires[2].
La franchise et la vérité devant primer dans le contenu de la soumission, la conduite du soumissionnaire sera évaluée par les tribunaux en fonction de la réponse à la question suivante :
– le soumissionnaire était-il de bonne foi lorsqu’il a rédigé la soumission ?
Dans la négative, le soumissionnaire et les personnes ayant participé à la rédaction de la soumission se rendront personnellement responsables des dommages causés au donneur d’ouvrage et aux autres soumissionnaires.
[1] À titre d’exemple : Le donneur d’ouvrage ne s’engage pas à retenir la plus basse soumission conforme ou aucune des soumissions déposées.
[2] Immobilière (L’), société d’évaluation conseil inc. c. Évaluations BTF inc., 2009 QCCA 1844
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Un esprit qui, jour après jour, relève les bons défis et choisit les bonnes batailles reste serein et grandit sainement. [Daniel Desbiens]