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6 juillet 2011 Vol. 6 No. 63

Appels d’offres : La clause de réserve… oui mais avec réserve!

Auteur : Jean Rousseau
Jean Rousseau
Jean Rousseau

En matière d’appel d’offres, la règle veut que le donneur d’ouvrage procédant à l’appel d’offres ne considère, dans le cadre de l’attribution du contrat, que les soumissions conformes à l’appel d’offres.  Cependant, la plupart des documents d’appel d’offres comportent une clause de réserve prévoyant que le donneur d’ouvrage ne s’engage pas à adjuger le contrat ni au plus bas soumissionnaire ni à aucun des soumissionnaires.  Cette clause est-elle légale et peut-elle permettre au donneur d’ouvrage de refuser d’accorder le contrat à un soumissionnaire ayant suivi avec rigueur l’ensemble du processus d’appel d’offres?

Et bien la réponse est oui; les tribunaux ont reconnu le droit du donneur d’ouvrage d’inclure, à même les documents d’appel d’offres, une telle clause de réserve. Celle-ci est d’ailleurs justifiée par les imprévus tant économiques que fonctionnels que peut rencontrer le donneur d’ouvrage. En effet, on ne pourrait exiger d’un donneur d’ouvrage qu’il accorde un contrat alors que survient un imprévu rendant son financement inaccessible ou alors que ses besoins ont changé et rendent l’ouvrage inutile. Dans le même ordre d’idées, une telle clause, en matière d’appel d’offres privé n’impliquant pas le gouvernement comme donneur d’ouvrage, pourra permettre aux propriétaires d’accorder le contrat à un soumissionnaire n’étant pas le plus bas soumissionnaire en autant cependant qu’il soit conforme à l’appel d’offres. Cette façon de faire pourra permettre au donneur d’ouvrage de considérer d’autres critères que le simple prix afin de déterminer à qui pourra être accordé le contrat.

Cependant, même si une telle clause peut permettre au donneur d’ouvrage de signer un contrat avec un entrepreneur autre que le plus bas soumissionnaire ou avec aucun de ceux ayant soumissionné, la Cour Suprême du Canada, dans une décision, impose au donneur d’ouvrage l’obligation de traiter tous les soumissionnaires équitablement. Le donneur d’ouvrage ne pourrait donc utiliser la clause de réserve de façon à favoriser un soumissionnaire plutôt qu’un autre. Par ailleurs, il va de soi que le donneur d’ouvrage, s’il octroie un contrat, devra, nonobstant la clause de réserve, obligatoirement l’accorder à un soumissionnaire ayant déposé une soumission conforme à l’appel d’offres. La clause de réserve ne sera donc d’aucune utilité afin de permettre au donneur d’ouvrage d’accorder le contrat à un entrepreneur n’ayant pas suivi le processus d’appel d’offres et/ou les conditions imposées dans les documents.

Les clauses de réserve peuvent donc être utilisées par le donneur d’ouvrage mais doivent être utilisées avec réserve. Si ces clauses peuvent servir en cas d’imprévu, il faudra qu’elles soient utilisées en tenant compte des limites imposées par la Cour Suprême, à savoir traiter l’ensemble des soumissionnaires sur un pied d’égalité et n’accorder le contrat qu’à un soumissionnaire ayant respecté les dispositions prévues aux documents d’appel d’offres.

Enfin, notons que, dans le cas d’appels d’offres faits par une instance gouvernementale, la loi prévoit dans ces cas spécifiques que le contrat doit obligatoirement être accordé au soumissionnaire conforme le plus bas en principe. Dans ces circonstances, une clause de réserve ne pourrait avoir pour effet de permettre l’octroi du contrat à un soumissionnaire autre que celui qui est conforme et le plus bas.

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