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5 avril 2017 Vol. 10 No. 12

Appel d’offres : le manque d’années d’expérience équivaut-il à une irrégularité majeure ?

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Dans un jugement récent[1], la Cour d’appel a dû déterminer si une ville a commis une faute en octroyant un contrat à un soumissionnaire n’ayant pas le nombre d’années d’expérience requises par les documents d’appel d’offres

Dans le jugement en question, l’une des conditions de l’appel d’offres était la suivante : «l’installation du revêtement doit être faite par un entrepreneur ayant sa principale place d’affaires et opérant depuis au moins cinq ans au Québec ». Or, la ville a octroyé le contrat à un entrepreneur étant en opération depuis seulement deux ans.

L’avis aux soumissionnaires indiquait que la ville s’engageait envers les soumissionnaires à n’accepter qu’une soumission conforme, mais lui permettait toutefois de passer outre à une irrégularité mineure s’il n’en résultait aucun préjudice pour les autres soumissionnaires.

La Cour devait donc s’interroger à savoir si l’irrégularité quant au nombre d’années d’expérience était une irrégularité mineure ou majeure.

Pour être qualifiée de majeure, une irrégularité doit découler d’un manquement à une exigence essentielle ou substantielle. Trois questions se posent alors : « 1) l’exigence est-elle d’ordre public? 2) les documents d’appel d’offres indiquent-ils expressément que l’exigence constitue un élément essentiel? et 3) à la lumière des usages, des obligations implicites et de l’intention des parties, l’exigence traduit-elle un élément essentiel ou accessoire de l’appel d’offres? »

Malgré que les documents d’appel d’offres n’indiquaient pas expressément que l’expérience de l’entrepreneur était une condition essentielle, la Cour est d’avis que cette condition était importante pour la ville. En effet, il appert que la ville désirait s’assurer que l’entrepreneur avait l’expérience requise pour procéder aux travaux et que celui-ci était assez fiable considérant que le contrat incluait également l’entretien pendant plusieurs années du revêtement installé.

De plus, la Cour remarque que dans la clause en question, le mot « doit » est utilisé, alors que ce terme est généralement employé dans les documents d’appel d’offres lorsque l’obligation est impérative. Ainsi, la Cour est d’avis qu’une personne raisonnable qui prenait connaissance de cet appel d’offres comprenait que seules les entreprises implantées et opérant au Québec depuis au moins cinq ans étaient admissibles à y participer. La Cour conclut donc que le manque d’expérience de l’entrepreneur retenu était une irrégularité majeure, faisant ensorte que la ville a été fautive de lui octroyer le contrat.

[1] Tapitec inc. c. Ville de Blainville, 2017 QCCA 317


 

Pensée de la semaine:

L’ami vrai, ce n’est pas celui qui sait se pencher avec pitié sur notre souffrance, c’est celui qui sait regarder sans envie notre bonheur.

 

Gustave Thibon

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